Paris, époque Empire 1804 – 1815, vers 1805 – 1810
MATIÈRES : bronze patiné et doré ; marbres polychromes.
DIMENSIONS : H. 80,5 cm ( 31 3/4 in. ) ; D. 90 cm ( 35 1/2 in. ).
PROVENANCE : Collection Privée.
ACQUIS PAR : Collection Privée.
Le guéridon présente un riche plateau en marqueterie de marbres polychromes, à bordures noires et blanches, structuré autour d’un damier central. Celui-ci repose sur une armature en acier rehaussée au pourtour d’un liseré de bronze doré à motifs de godrons formant ressaut. Un puissant fût central à double balustre en bronze patiné, enrichi d’un anneau médian en bronze doré à cannelures torses et bordé de larges feuilles d’eau alternant avec des motifs fleuronnés à enroulements, supporte l’ensemble. Il repose sur une base tripode en bronze patiné, à pans coupés aux angles et côtés incurvés, couronnée d’une frise de godrons dorés.
Un guéridon similaire, estampillé Jacob D. / rue Meslée, mais à piètement orné de lions ailés et couchés “Chimères” et non de sphinges assises, fut exécuté vers 1805 d’après un dessin de Percier pour le maréchal Murat au Palais de l’Elysée, à Paris (1).
Celle-ci accueille en terrasse trois sphinges assises aux ailes déployées, traitées en bronze patiné et doré, coiffées chacune d’un “némès” supportant une coupelle en bronze doré, ciselé d’une corolle de feuilles lancéolées. Cette coupelle forme la base d’une colonnette baguée et légèrement fuselée, en bronze patiné, fixée à l’armature en acier supportant le plateau en marbre du guéridon. Ce guéridon est orné d’un plateau en marqueterie de pierres signé Giovani Andrea a Torino fecit a Firenza 1801, le guéridon est en effet dûment mentionné dans “ L’état général des tableaux et objets d’art existant dans le Palais de l’Elysée appartenant à LL.MM. le Roi et la Reine de Naples “, dressé en 1808, au moment du départ de Murat et de Caroline Bonaparte pour le royaume de Naples et de la remise du Palais à Napoléon (2).
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(1). Il est intéressant de noter que le fût central à double balustre du guéridon Murat est en bois sculpté, patiné et doré. Le nôtre en est la parfaite transcription en bronze.
(2). Source : Denise Ledoux-Lebard, Inventaire général du musée national de Versailles et des Trianons. Tome I. Le Grand Trianon. Meubles et Objets d’Art, Paris, 1975, P. 147 – 149, repr.
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Il ornait alors la chambre à coucher de parade des grands appartements du rez-de-chaussée. En 1809, il figurait dans le salon particulier de l’Impératrice Joséphine, pièce dénommée en 1813, grand salon cramoisi de l’Impératrice Marie-Louise, emplacement qu’il conserva jusqu’en 1820.
Puis il passa ensuite dans le deuxième salon de service de l’Empereur Napoléon III. Le guéridon quitta l’Elysée en 1872 et fut envoyé deux ans plus tard meubler le Grand Trianon, où il se trouve toujours aujourd’hui ( Fig. 1).
Un second guéridon, identique à celui de Murat, exception faite de son plateau en porphyre rouge, appartient à une collection privée.
La Maison JACOB
Les Jacob comptent parmi les plus célèbres familles d’ébénistes parisiens qui parvinrent, sur trois générations actives dès le dernier tiers du XVIIIe siècle et jusqu’ à la fin de la première moitié du XIXe siècle, à maintenir au premier rang la réputation de leur entreprise. Après la disparition prématurée de son fils ainé, Georges II, mort le 23 octobre 1803, qui mettait fin à la raison sociale Jacob-Frères, Georges Jacob (1739-1814, maître en 1765) décida de former une nouvelle association avec son second fils, François-Honoré-Georges (1770-1841), association de neuf ans dont la dénomination sociale prit le nom de Jacob-Desmalter et Cie.
Le nom de Desmalter avait été ajouté à celui de Jacob dès la période du Directoire (1795-1799) en souvenir d’une terre familiale, “Les Malterres”, qu’un aïeul de la famille possédait à Cheny, en Bourgogne. Sous le Premier Empire, Jacob-Desmalter devint menuisier-ébéniste-fabricant de meubles et bronzes de LL.MM.II. et RR. ( Leurs Majestés Impériales et Royales), L’Empereur et l’Impératrice étant également Roi et Reine d’Italie depuis 1805. Pendant tout le règne de Napoléon I, il fut le principal fournisseur du Mobilier Impérial, distançant et de très loin tous ses contemporains. Il en fut également de même pour le commerce privé. Si l’on s’en réfère à l’étude d’Hector Lefuel, les ateliers des Jacob, qui comptèrent jusqu’ à 332 artisans vers 1808, livrèrent pour près de dix millions de francs de meubles entre 1796 et 1813.
Un cinquième seulement de cette somme colossale concerna les fournitures publiques, un tiers fut voué à l’exportation, tout le reste représentait les achats faits par des particuliers. (3). Jacob-Desmalter déposa son bilan le 15 janvier 1813. L’Etat, son principal client, fut le grand responsable de cette situation en n’honorant pas en temps et en heure les nombreux mémoires souscrits auprès de la maison Jacob. L’Épouse de François-Honoré-Georges, séparée de bien, put momentanément diriger l’entreprise, cela jusqu’ au rétablissement de Jacob-Desmalter à la tête de son établissement, ses créanciers ayant reconnu, dès le début de la Restauration, qu’il avait été uniquement victime des évènements politiques.
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(3). Voir Hector Lefuel, Fançois-Honoré-Georges Jacob-Desmalter, ébéniste de Napoléon I et de Louis XVIII, Paris, S.D. 1926.